
Ce que je vais marquer risque d'être assez long mais ne vous sentez pas obligé de tout lire, surtout si le sujet ne vous intéresse pas plus que ça.
Tout d'abord, je précise que dans ce sujet, je vais utiliser le terme de piratage car ça va me simplifier les choses, mais je sais que ce n'est pas forcément très juste. Le piratage, c'est normalement, s'emparer du bien d'autrui (par exemple, quand en mer, un groupe de pirates s'empare d'un pétrolier). Dans le cas d'œuvres numériques, il s'agit de contrefaçon. Dans l'imaginaire des gens, je pense qu'un pirate est plus méchant qu'une personne faisant une contrefaçon.
Actuellement, la loi prévoit en cas de contrefaçon, une peine maximale de 3 ans de prison, ainsi que 300.000 euros d'amende. Dans les faits, cela ne concerne que les pirates professionnels (c'est à dire ceux qui en ont fait une industrie et qui gagnent beaucoup d'argent avec cette activité).
Les industriels du cinéma et de la musique ont bien essayé de trainer des citoyens ordinaires devant la justice mais les sanctions ont été faibles ou inexistantes.
Par exemple, il y a eu un cas avec un RMIste ayant téléchargé plusieurs milliers de musiques et l'avocat de la SACEM expliquait qu'évidemment, s'il n'avait pas téléchargé ces milliers de titres, il les aurait acheté et donc, il y a un manque à gagner de 20.000 euros pour la SACEM. Du côté du juge, il était assez sceptique sur le fait qu'une personne touchant 350 euros par mois puisse débourser 20.000 euros par mois en musique et donc, l'estimation des pertes pour l'industrie musicale était très surestimée. Au final, il n'y a eu aucune grosse peine en France contre des particuliers téléchargeant des contenus protégés.
Les auteurs étant mécontents des sanctions données par la justice, ont fait pression pour la création d'une nouvelle loi pour punir davantage.
Avant toute chose, si vous entendez des personnes dire que cette nouvelle loi est dure que l'ancienne loi sur la contrefaçon, cela est faux. La loi sur la contrefaçon existe toujours et l'HADOPI est en plus.
Cela signifie qu'en théorie, on peut être condamné sur ces 2 lois !
En pratique, il est heureusement peu probable que la SACEM poursuive un particulier pour contrefaçon devant la justice française car comme je l'ai dit plus haut, la justice a plutôt tendance à relaxer les accusés. Avec l'HADOPI, il est prévu qu'il y ait 2 avertissements, puis que la sanction tombe.
Chose que je trouve anormale, il n'est pas prévu que l'on puisse contester les 2 avertissements.
J'aurais trouvé ça normal qu'on puisse contester un avertissement. On pourra uniquement contester l’infraction donnant lieu à une sanction.
Je trouve aussi dommage et anormal que ce ne soit pas l'autorité judiciaire qui soit en charge de l'HADOPI.
Avec l’HADOPI, il ne devrait pas y avoir d’amende mais cela risque tout de même de coûter cher au pirate. Si on a une coupure de 1 an d’Internet (avec impossibilité de résilier et de prendre un abonnement ailleurs), cela fera coûtera cher car même si on est coupé d’Internet, il faudra continuer à payer pour un service non rendu !
Avec cette nouvelle loi, on sera présumé coupable, c'est-à-dire que l’on est accusé et c’est à nous d’apporter les preuves de notre innocence.
Pour le moment, la seule et unique solution qui semble envisager pour permettre de prouver notre bonne foi, c’est d’installer Windows sur notre ordinateur et de mettre dessus un spyware qui va contrôler que le firewall et l’antivirus sont bons et que l’on ne fait pas de P2P (emule, bittorent, etc.).
Est-ce que le système de détection sera sans faute ? On peut en douter car il y a toujours des ratés, comme c’est par exemple le cas avec les radars automatiques. Par exemple, il y a le cas de gens qui ont reçu des amendes pour excès de vitesse alors que ce n’était pas eux et ils ont la plus grande peine du monde à prouver leur innocence, même quand pourtant, c’était flagrant.
Comment vont être détectés les « pirates » ?
Je crains que les gens de la SACEM se contentent de regarder les adresses IP qui sont sensées proposer un fichier. Le problème, c’est qu’il est assez facile de faire des « faux » et donc, avec un tel système, un innocent peut se faire condamner.
Il est important que l’adresse IP suspectée transmette des données pour être sûr que ce n’est pas un faux lien et que la personne possède bien le fichier.
Est-ce que le fait que l’adresse IP existe et qu’elle possède un fichier qu’elle a mis en partage, suffit à dire que c’est un pirate ? Et bien, la réponse est non. Si vous avez déjà téléchargé sur emule, il vous est peut être arrivé de vouloir télécharger un film et de vous retrouver avec un film de cul, ou bien avec la bande annonce du film en boucle, ce qui montre que le titre du fichier peut être trompeur. Par exemple, je peux faire un film de famille et lui donner le nom de Welcome.avi, puis le mettre en téléchargement sur emule. Si l’industrie du cinéma s’arrête au titre du film, ils peuvent croire que je diffuse un film illégalement et donc, me sanctionner. C’est pour ça qu’il faut aussi que celui qui fait le contrôle devrait récupérer l’intégralité du fichier et vérifier son contenu. Pour le moment, je crois qu’ils ont uniquement prévu de regarder les adresses IP, ce qui ouvre la voie à un nombre important d’erreurs.
Je désapprouve fortement notre système de taxe de copie privé car cela coûte cher et cela n’apporte aucun droit (les juges l’ont redit récemment, la copie privé n’est pas un droit mais uniquement une tolérance).
Dans le cadre d’une licence globale, je serais moins choqué par ce nouvel impôt dans le sens où au moins, cela donnerait le droit de télécharger autant que l’on veut légalement.
Du côté du gouvernement ou des ayants droits, on est très fortement opposés à la licence globale et l’argument qui est le plus souvent avancé, c’est celui de dire que ce serait un impôt injuste dans le sens où tout le monde paierait alors que tout le monde ne télécharge pas. Je suis à 100% d’accord avec eux sur le fait qu’il y aurait une injustice pour ceux qui ne télécharge pas mais si on suit leur logique, il faudrait donc supprimer la taxe copie privé car c’est injuste qu’une personne qui achète un disque dur/CD/DVD/disquette/clé usb/etc. doive payer une taxe même si elle ne s’en sert pas pour stocker des données sous copyright.
Apparemment, il risque d’être délicat de couper uniquement l’accès Internet et donc, on risque aussi d’avoir son téléphone et sa télévision de couper. Celui qui a sa box Internet de couper risque de se retrouver un peu coupé du monde.
A mes yeux, il y a aussi le problème de l’égalité de traitement car tous les français ne seront pas sur un pied d’égalité. Si vous êtes une profession libérale et que vous utilisez votre accès Internet également pour des raisons professionnelles, alors vous ne risquez pas la coupure de votre accès Internet.
Pour ce qui est des avertissements, il semble que ce soit un texte minimum, du style "attention, vous avez illégalement piraté des fichiers protégés par le droit d'auteur". Je trouve que le minimum serait d'indiquer aussi la date et l'heure exacte où l'infraction a été relevée, ainsi que le nom des fichiers protégés.
Pour citer quelques erreurs de détection en grande bretagne, un couple de retraité avait été accusé d'avoir téléchargé des fichiers sans aucun rapport avec eux (c'était soit des vidéos style télétubbies, soit de la musique RAP) et au tribunal, le juge a bien pu se rendre compte que le couple n'avait jamais téléchargé en P2P (le couple avait déjà du mal avec le web et la messagerie) et que s'ils avaient téléchargé, ce n'était pas ce genre de fichiers qu'ils auraient pris. C'est pour ça que pour se défendre d'une fausse accusation, il est important d'avoir un maximum d'informations de communiquées.
A mon avis, si la loi fait peur aux pirates pauvres, ceux-ci arrêteront peut être de télécharger mais ils n'achèteront pas pour autant car ils n'auront pas les moyens de le faire. Pour ce qui est des pirates riches, il leur sera facile de se protéger. Gratuitement, il existe un système TOR de proxy anonyme mais qui a le défaut d'être lent, mais contre quelques euros par mois (5 euros environ), on peut avoir de très bons proxy anonyme qui permettent de continuer à télécharger en P2P à des débits très corrects. Je pense qu'une personne qui a de l'argent n'hésitera pas à dépenser cette somme pour être tranquille.
Je m'arrête là car il est déjà tard mais je pourrais en écrire encore beaucoup sur le sujet

Edit : Je précise que mon message n'a pas pour but d'encourager le pirate, ni de demander sa légalisation.
Je pense même que la contrefaçon engendre des pertes de revenue pour les ayants droits.
Si je suis contre l'HADOPI, c'est que pour moi, il y a trop de mauvaises choses dedans.
Pour faire une analogie, je trouve que les radars automautiques ont un bon objectif mais je trouve qu'il y a aussi de mauvaises choses, comme le fait que c'est très difficile de contester une amende.
Ce qui m'a aussi pas mal énervé avec l'HADOPI, ce sont les déclarations de certaines personnalités qui ont dit des choses assez honteuses et qui a montré de la mauvaise foi et une ignorance du dossier. Ce qui est également énervant, ce sont ceux de l'UMP qui défendent le plus la loi et qui en même temps enfreignent sans remord le droit d'auteur sur Internet.
Ce midi, FR3 Ile de France a diffusé un reportage sur l'HADOPI et on voyait un type regarder un film en streaming, ainsi qu'un type télécharger un film sur Rapidshare/MegaUpload et le journaliste expliquait que l'HADOPI était destiné à arrêter ce genre de pratique alors que l'HADOPI ne dit rien sur ce genre de pratique de réception de données ! En dehors des journalistes de sites informatiques, je ne vois que des reportages inexacts sur le sujet.